Le Réseau des organisations paysannes et de producteurs de l’Afrique de l’Ouest (ROPPA) a organisé ce mardi 26 avril 2022 un webinaire sur l’impact de la flambée des prix des engrais sur la campagne agricole 2022-2023 et les actions à envisager pour contenir les menaces qui pèsent sur ladite campagne. Le webinaire était animé par plusieurs communicateurs dont entre autres Sanoussi Bouya Sylla, Sy Traoré, Kako Nubukpo, Athanase Traoré et Ibrahim Coulibaly. Il ressort des échanges que la campagne agricole 2022-2023 serait laborieuse en raison de l’absence ou l’insuffisance évidente des engrais et leur cherté, cependant les acteurs du secteur agro-sylvo-pastoral et les pouvoirs publics doivent faire leur mue pour relever avec efficacité les défis des campagnes à venir.
L’Afrique de l’Ouest se prépare à faire son entrée dans une campagne agro-sylvo-pastorale 2022-2023 complexe. Un cocktail de cinq crises aura contribué à précipiter cette partie de l’Afrique dans cette situation. Il s’agit des crises climatique, sécuritaire, politique, sanitaire et géopolitique avec en toile de fond la guerre Russie-Ukraine. Ce cocktail a provoqué une flambée des prix des engrais indispensables pour l’accroissement des productions agricoles.
Face à cette situation, les Organisations ouest africaine dont la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et l’Union économique et monétaire ouest africaine (UEMOA) doivent faire du secteur agro-sylvo-pastoral, la priorité des priorités. C’est l’avis de Ibrahim Coulibaly, Président du Conseil d’administration du ROPPA. Cela pourrait passer par la mobilisation des fonds d’urgence pour soutenir le secteur agro-sylvo-pastoral. Il a indiqué que cette posture devrait contribuer à prendre les dispositions pour avoir un regard sur les engrais et les disponibiliser au mieux pour les producteurs. Ibrahim Coulibaly explique également qu’il ne faut pas pousser les producteurs à se lancer dans la culture de spéculation trop gourmande en eau, comme le maïs. Il suggère des cultures plus résilientes et capable de faire face avec fierté au stress hybride telles que le mil, le sorgho et le fonio.
Dans sa communication, Sanoussi Bouya Sylla, Président de l’Assemblée permanente des Chambres d’agriculture du Mali et du RECAO, a invité les producteurs à une gestion parcimonieuse du peu d’engrais qu’ils auront et surtout d’emblaver des superficies qu’ils sont certains de pouvoir couvrir avec les engrais. Il suggère en outre de se retourner vers les engrais organiques vu l’absence ou l’insuffisance de l’engrais chimique.
Alain Sy Traoré, le directeur de l’agriculture et du développement rural de la CEDEAO s’est pour sa part insurgé contre l’opposition faite entre les engrais chimique et organique. Pour lui, cette opposition n’est saine et n’a pas lieu de l’être. Ils sont complémentaires et ont tous le même but, celui de contribuer à accroitre la production agricole. Sy Traoré a en outre regretté le manque d’action et de vision ferme des décideurs. « Les problèmes sont longtemps connus, les actions à entreprendre également, mais elles ne suivent jamais » a-t-il déploré. Il a fait noter qu’au regard du temps imparti, il faudra bien admettre que « on ne peut plus sauver cette campagne agricole ; ce n’est plus la peine ». En outre, il faudrait travailler dès maintenant à se préparer pour faire face aux autres campagnes à venir.
Athanase Traoré, le Chef de division sécurité alimentaire et accès aux marchés CILSS, a lui suggéré que des dispositions soient prises par les Organisations professionnelles des producteurs et des décideurs politiques pour privilégier des commandes groupées. Cela permettra de réduire les coûts et avoir une maitrise de la production. La mise en place des usines de production d’engrais a également été proposé afin de réduire la dépendance de la sous-région ouest-africaine vis-à-vis des engrais occidentaux et asiatiques. A ce propos, le directeur commercial d’Eléphant Vert Mali a indiqué que sa structure s’est donnée pour mission de mettre à la disposition des producteurs des engrais chimiques et organiques à fort impact sur le rendement. Les capacités de production sont grandes, mais les différentes crises limitent les possibilités de l’entreprise, surtout au Mali sous embargo.
« Il n’y a pas de problème financier pour acquérir les engrais, le vrai problème se trouve au niveau de l’organisation. », selon Kako Nubukpo, le Commissaire chargé du département de l’Agriculture, des ressources en Eau et de l’environnement de l’UEMOA. Il a donc plaidé pour l’implication des acteurs pour parvenir à mettre en place une stratégie organisationnelle et opérationnelle qui permettra de prendre en charge de façon adéquate les préoccupations fondamentales des producteurs. Kako Nubukpo a en outre invité les producteurs à une gestion minutieuse des engrais qu’ils auront et aussi de privilégier des systèmes culturaux rationnelles comme le Zaî.
Au terme des échanges, le ROPPA s’est engagé à poursuivre les efforts pour trouver des solutions adéquates qui permettront de faire de l’Afrique de l’Ouest le grenier du monde dans les années à venir.
Ahmed Traoré
Sentinelle BF
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