Burkina Faso : Bras de fer autour du prix pain

Le bras de fer entre le gouvernement burkinabè et la Coordination des faîtières des boulangeries est engagé depuis le 25 mai 2022. Les deux parties se tendent des embuscades, frappent comme la foudre et se réfugient dans les tranchées pour mieux observées les réactions de l’adversaire. Les populations sont prises au piège de ce bras de fer dont le pays n’en a vraiment pas besoin en ces moments.

Ce 24 mai 2022, les boulangers et pâtissiers sont passés à la vitesse supérieure. Face à l’augmentation de plus de 50% sur le prix de la tonne de farine de blé, les boulangers ont regardé l’article 4 de l’arrêté n 2011-0224/MICA/SG/DGCI du 2 décembre 2011 qui autorise les différentes entreprises industrielles à procéder à un réajustement des prix lorsque l’inflation de sa matière première dépasse la barre de 5%. Elles devraient au préalable notifier cet ajustement à l’autorité du Ministère en charge du Commerce. Ce fondant sur cet article, les boulangers ont notifié au Ministre Abdoulaye Tall l’augmentation du prix du pain de 200 g. Ce pain devrait alors passer de 150 franc cfa à 200 franc cfa à compter de ce mardi 24 mai 2022 à 22h. Pour les boulangers, c’est soit l’augmentation, soit la fermeture des boulangeries.

Pris de court par cette décision, le Ministre en charge du Commerce a rejeté cette augmentation unilatérale du prix du pain de 200g. Il reconnait le problème d’inflation posé par les boulangers, mais juge leur réponse mauvaise. Abdoulaye Tall explique que le décret N 2020-0532/PRES/PM/MCIA/MJ/MINEFID stipule que « l’agrément des devis ou des demandes de fixation des prix est consacré par arrêté du Ministre chargé du commerce après avis de la commission nationale de la concurrence et de la consommation. » Et au regard de cette disposition, le Abdoulaye Tall qualifie d’illégale la nouvelle facturation du prix de la baguette de pain ; en conséquence le Ministre a indiqué que les contrevenants seront punis. Pour le gouvernement, il faut préserver le coût de la vie des populations.

Les contrôles effectués dès le matin du 25 mai 2022 par les services du ministère ont procédé à la fermeture manu militari de six (6) boulangeries qui avaient décidé de passer outre l’appel du ministre pour facturer à 200 franc cfa le coût de la baguette de pain. Il n’en fallait pas plus pour pousser les boulangers à faire sortir l’artillerie lourde. La décision d’arrêter à la fabrication du pain sur toute l’étendue du territoire nationale est alors prise par les boulangers.

Le pain a une valeur sociale assez forte au Burkina Faso. Les boulangeries emploient directement des milliers de jeunes et plusieurs autres milliers de jeunes et de femmes ont pu créer des microentreprises grâce au pain. Le gouvernement, les populations et les boulangers reconnaissent tous que le coût de la farine de blé a explosé. Face à ces réalités, il est évident que des dispositions sont à prendre de façon concertée pour soulager les boulangers et leur permettre de poursuivre leur activité. Mais prendre les dispositions pour soulager les populations, ne signifie pas seulement augmentation du prix de la baguette de pain chez le consommateur. En Côte d’ivoire, le prix du pain a été maintenu, mais le gouvernement a décidé d’offrir des facilités fiscales aux boulangers en exonérant par exemple l’importation de la farine de blé. Des dispositions similaires peuvent être prises au niveau du Burkina Faso pour soutenir les boulangers durant une période donnée.

Dans un contexte comme celui du Burkina Faso, il faut travailler à éviter une autre crise qui ne contribuera qu’à plonger davantage le pays dans le gouffre. Les cadres de concertation existent et il faut bien que ces espaces puissent jouent leur rôle pour ne pas laisser croire qu’au Burkina Faso chacun peut faire ce qu’il veut, comme il le veut et il n’y a rien.

A Traoré

Sentinelle BF