Burkina Faso : Paul Henri Damiba se met au pieds du mur !

A la tête du Mouvement patriotique pour la sauvegarde et la restauration (MPSR), le Lieutenant-colonel Paul Henri Sandaogo Damiba, a officiellement renversé du pouvoir Roch Marc Christian Kaboré ce lundi 24 janvier 2022 à leur faveur d’un putsch. Le quarantenaire prend ainsi les rennes du pouvoir dans un contexte où les attentes des Burkinabè restent encore plus fortes.

Malgré sa réélection par 57,87% des voix lors de l’élection présidentielle de novembre 2020, Roch Marc Christian Kaboré a été déchu par des éléments de l’armée Burkinabè conduit par le Lieutenant-colonel Paul Henri Sandaogo Damiba. L’annonce de cette destitution survenue dans la soirée de ce lundi 24 janvier 2022 a été suivie par des manifestations de joie d’une population exacerbée par six ans de gouvernance décriée. En six ans de gouvernance Kaboré, le Burkina Faso est passé par toutes les épreuves et pire les épreuves sont allées de mal en pis. Les extrémités ont été atteintes au cours de cette année 2021 surtout en qui concerne la question de l’insécurité.

                                             Le cocktail explosif

L’attaque perpétrée à Solhan aura été l’une des plus meurtrières commises par les Groupes armés terroristes (GAT) contre les populations Burkinabè. Au moins 160 personnes ont alors été tuées, dans la nuit du 4 au 5 juin 2021, par des éléments d’un Groupe terroriste constitué essentiellement d’enfants et de femmes selon les autorités de l’époque. Cette attaque a plongé les populations burkinabè dans un épouvantable émoi, ce d’autant plus qu’aucune intervention des Forces de défense et de sécurité (FDS) n’a été enregistrée alors qu’un camp militaire est situé à une dizaine de kilomètre de la scène de massacre. A l’issue de cette attaque, aucune ferme réaction du Président Kaboré et de son Gouvernement n’a été notée. L’ampleur du drame rappelle bien celui de Yirgou qui a fait au moins 200 personnes tuées en 2019, selon la société civile, sans une réaction véritable du Chef de l’Etat Roch Marc Christian Kaboré.

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C’est au cours de cette année 2021 également, précisément que les Forces de défense et de sécurité ont enregistré leur plus grande perte due à l’insécurité. Tôt dans la matinée de ce jour 14 novembre 2021, les éléments du détachement de gendarmerie d’Inata ont subi une attaque terroriste d’une rare violence. Au moins 54 gendarmes sont tués et une trentaine sont portés disparus. L’horreur de cette attaque ne tient pas seulement du nombre de victimes, elle tient surtout de ce qu’elle a révélé. D’abord, ces éléments étaient en fin de mission et attendaient d’être relevés. Les problèmes organisationnels n’ont pas permis cette relève. Cette situation a plongé le détachement dans une situation où ils n’avaient plus de quoi se nourrir. Malgré leur insistant appel à approvisionnement, rien ne fut fait pour eux jusqu’à ce que l’irréparable se produise. Et pire, au cours de l’attaque ils n’ont pas pu être appuyés par l’hélicoptère de l’armée de l’air Burkinabè.

Les Volontaires pour la défense de la patrie (VDP) ont connu la plus grande perte au cours de cette année 2021. Le 23 décembre dernier, alors que les VDP de Titao, avec à leur tête le célèbre Ladji Yôrô, escortaient un convoi transportant des marchandises, ils ont été pris dans une violente embuscade qui s’est soldée par la mort d’une quarantaine de personnes dont le célèbre VDP. Cet autre drame a révélé que l’hélicoptère de l’Armée Burkinabè qui avait supervisé le déplacement du convoi de Titao à Ouahigouya n’a pas pu faire le trajet retour avec le convoi. Et cela a été un choix fatal.

Près de 2 millions de personnes déplacées internes au Burkina Faso

Sur le plan humanitaire, le pays a enregistré une crise jamais égalée. Les Groupes armés terroristes (GAT) gagnent du terrain, annexent des localités, des communes toute entière, imposent des ultimatums aux populations, tout cela sans que les Burkinabè ne sentent leur chef d’Etat dans une posture guerrière. Conséquence, les services publics dénombrent un peu plus de 1.500.000 personnes déplacées internes, près de 15% des écoles du pays sont fermées, la production agricole est en chute libre.

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A tout cela, il faut ajouter un front social que les ministres du gouvernement Kaboré ont contribué à surchauffer malgré que les syndicats aient visiblement lâché prise au regard du danger que guettait la République. Les exemples les plus édifiants restent les violences disproportionnées dirigées contre les acteurs du monde éducatif avec notamment les suspensions à l’aveuglette des salaires des enseignants, la répression inouïe abattue sur les élèves et étudiants, la fermeture unilatérale du plus grand établissement du pays etc. C’est dans un contexte pareil qu’est intervenu la fameuse vérification des diplômes des agents publics de l’Etat et surtout la remise à plat du système de rémunération de ces agents.

                                     L’avènement du MPSR

La gravité de la situation et l’incapacité du Président Roch Marc Christian Kaboré à remettre le pays dans la bonne direction n’étaient plus qu’une vue d’esprit pour les burkinabè. Même au sein de son parti politique, des voix s’élevaient pour dénoncer les errements constatés dans la gouvernance. Lorsqu’il décidait de composer un gouvernement plus resserré et de combat, Roch Marc Christian Kaboré fait le choix d’inviter Lassina Zerbo pour diriger un gouvernement peu politisé. Mais il était déjà tard car les Burkinabè ne pouvaient plus se payer le luxe de poursuivre dans la tergiversation et le tâtonnement. C’est ainsi que les appels à manifestation ont été lancés avec un seul mot d’ordre : la démission du Président Kaboré. Les mesures liberticides prises par le gouvernement pour contrer les manifestations ont contribué à exacerber la colère des populations qui ont bravé toutes les interdictions de marche édictées par le Maire de la commune de Ouagadougou, Armand Pierre Béouindé.

Paul Henri Damiba, Président du MPSR

Ph.Dr

C’est sur un tel terreau qu’est intervenu le putsch du Mouvement patriotique pour la sauvegarde et la restauration (MPSR) dirigé par le Lieutenant-colonel Paul Henri Sandaogo Damiba ce lundi 24 janvier 2022. Le Burkina Faso qui croyait définitivement tourner la page des coups d’Etat militaire se voit à nouveau faire face à un coup de force perpétré par ses militaires. Ces derniers ont clairement la mission de mettre le Burkina Faso sur une bien meilleure trajectoire et de récréer l’espoir chez les Burkinabè martyrisés et terrorisés depuis six ans. L’implication des populations doit être surtout immédiate pour ne pas laisser s’installer une autre forme de gestion des affaires publiques qui va être décriée.

Ahmed Traoré

Sentinelle BF