Prêt en vivres au Burkina Faso : Quand la CEDEAO surfe sur la vulnérabilité d’un Etat

Une vue des vivres octroyées au Burkina Faso

La Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) a procédé ce vendredi 17 juin 2022 à Ouagadougou à la remise, sous de prêt, de 6.500 tonnes de vivres au Burkina Faso. Elle venait par ce geste d’honorer une demande formulée par le Burkina Faso, un pays tenaillé par des crises multidimensionnelles aigues. Ce geste, bien qu’il soit relativement bon à prendre lorsqu’on connait la situation alimentaire du pays, reste non seulement un coup de poignard dans l’intégrité du Burkina Faso, mais aussi un coup sur le sens même de cette organisation sous-régionale.

La situation socio-politico-sécuritaire du Burkina Faso est critique. Confronté à une crise sécuritaire qui rogne son intégrité territoriale et menace son existence en tant qu’Etat, une crise humanitaire d’une virulence sans égale, d’une crise politique qui a atteint un point sensible depuis le 24 janvier 2022, le Burkina Faso « se cherche », comme on le dira dans le jargon. En plus de toutes ces difficultés endogènes, le pays doit faire face à une conjoncture internationale marquée par des tensions inflationnistes généralisées et qui touche avec une acuité particulière le secteur alimentaire.

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Comme pour ne rien arranger pour ce pays, l’insécurité alimentaire sévit. Près de 15% de la population burkinabè se retrouve être en insécurité alimentaire. La mauvaise pluviométrie étant aussi passée par là. Face à toutes ces difficultés, le premier ministre burkinabè, Albert Ouédraogo lance un S.O.S. à la CEDEAO en lui demande une aide alimentaire à hauteur de dix milles (10.000) tonnes de vivres. Cette posture du Burkina Faso est peu louable, mais à l’impossible nul n’est tenu. Et si la CEDEAO est effectivement une communauté qui prône la solidarité, il ne devrait pas y avoir de honte à ce que le Burkina Faso puisse chercher des solutions à ses problèmes au sein de cette communauté.

La CEDEAO est bien imprégnée de toutes les difficultés du Burkina Faso. Il était même du devoir de cette institution de venir en aide, sur le plan alimentaire au moins à ce pays qui se trouve dans le creux de la vague. Au lieu de cela, la CEDEAO qui reçoit la demande en vivres de la partie burkinabè refuse de lui fournir les dix milles (10.000) tonnes demandées et décide de satisfaire la demande à seulement 65%. Elle offre 6.500 tonnes de vivres au Burkina Faso sous forme de prêt à rembourser « grain pour grain » d’ici mars 2023. C’est à croire que l’intention réelle, mais non manifestée de la CEDEAO à travers ce don, est de maintenir le Burkina Faso en situation d’humiliation et surfer sur sa vulnérabilité pour le maintenir le plus longtemps possible dans cette posture. La Sous-régionale aurait bien pu, au regard de la situation du pays, travailler à satisfaire d’abord les dix milles (10.000) tonnes de vivres demandées et proposer qu’elles soient remboursées d’ici le mois de mars 2024, dans la mesure où la campagne agricole en cours ne promet pas être la meilleure. La CEDEAO aurait pu porter à quinze milles (15.000) tonnes de vivres au Burkina Faso dont 10.000 tonnes à rembourser « grain pour grain » et 5.000 tonnes de vivres sous forme de don. Cela aurait pu être à l’honneur de cette institution.

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Il appartient en outre aux autorités burkinabè de prendre les dispositions pour que le peuple digne du pays des Hommes intègres n’aille plus tendre la besace à des pays frères qui devraient en principe lui venir naturellement en aide. Ce peuple là n’entend pas que la CEDEAO vienne en sapeur-pompier pour quoique ce soit, il faut travailler à ce que le feu ne s’allume pas d’abord. Une fois cet effort vain, on pourra enfiler la casquette de sapeur-pompier.

La rédaction

Sentinelle BF